Abstract :
[fr] Notre projet investigue les mécanismes cognitifs liés à la production et à la perception de la parole dans une perspective 'lifespan' (Baltes, Staudinger & Lindenberger, 1999). Plus précisément, nous étudions l'évolution avec l'âge des capacités d'apprentissage phonétique chez des participants sains francophones âgés de 45 à 80 ans, en évaluant leur aptitude à produire et percevoir des variantes non familières en langue française (ici, une occlusive initiale non voisée avec un VOT positif long). Les résultats obtenus permettront d'établir une ligne de base en vue d'étudier ultérieurement ces mécanismes chez des personnes présentant des troubles de la parole à étiologie cérébrale.
Dans des études antérieures (Delvaux, Huet, Piccaluga, & Harmegnies, 2013 ; Delvaux et al., 2014), les capacités d'apprentissage phonétique de participants âgés de 55 à 80 ans (14 hommes et 13 femmes), de langue maternelle française et ne rapportant pas d'antécédent d'atteinte neurologique, neuropsychologique ou langagière ont été évaluées. Les auteurs ont proposé des tâches de perception (discrimination AX) et de reproduction (répétition la plus fidèle possible) de pseudo-mots CV dont le VOT variait entre 20 ms (typique du français) et 100 ms (VOT extra-long: Cho & Ladefoged, 1999). Les résultats ont montré la présence d'un potentiel d'apprentissage phonétique chez les participants. Cependant, les performances restaient modérées et étaient influencées par d'autres variables liées aux participants, dont les pertes auditives (non déclarées, mais mises en évidence à l'aide d'un test d'audiométrie tonale aérienne), en partie liées à l'âge des sujets.
Dans la présente étude, actuellement en cours de recueil de données, nous présentons le même paradigme expérimental que celui décrit ci-dessus à 20 participants non pathologiques, âgés de 45 à 55 ans, de langue maternelle française et avec une perte auditive maximale de 40 dB (surdité légère), mesurée en audiométrie tonale aérienne, ce qui permet de limiter l'effet parasite potentiel des troubles auditifs (liés ou non à l'âge) sur les performances des participants. Ces résultats, combinés à ceux recueillis auprès de participants âgés de 55 à 80 ans dans les études antérieures (Delvaux et al., 2013, 2014) nous permettront d'observer l'évolution avec l'âge des capacités d'apprentissage phonétique, inscrivant dès lors cette étude dans le débat plus large relatif au déclin potentiel lié à l'âge des mécanismes cognitifs impliqués dans la perception et la production du langage (e.g., Burke, MacKay, & James, 2000).
Références bibliographiques
Baltes, P.B., Staudinger U.M. & Lindenberger, U. (1999). Lifespan psychology: Theory and application to intellectual functioning. Annual Review of Psychology, 50, 471-507.
Burke, D. M., MacKay, D. G., & James, L. E. (2000). Theoretical approaches to language and aging. In T. Perfect & E. Maylor (Éds.), Models of cognitive aging (pp. 204-237). Oxford, U.K.: Oxford University Press.
Cho, T. & Ladefoged, P. (1999). Variation and universals in VOT: Evidence from 18 languages. Journal of Phonetics, 27, 207-229.
Delvaux V., Cano-Chervel J., Huet K., Leclef C., Piccaluga M., Verhaegen C., & Harmegnies B. (2014). Capacités d'apprentissage phonétique et vieillissement [Abstract]. Congrès de l'Association Francophone de Psychologie de la Santé (AFPSA), 209.
Delvaux V., Huet K., Piccaluga M., Harmegnies B. (2013). Capacité d'apprentissage phonique et troubles du langage à étiologie cérébrale. In R. Sock, B. Vaxelaire & C. Fauth (Éds.), Travaux en phonétique clinique, Collection Recherches en PArole, CIPA (pp. 257-270). Mons : Éditions du CIPA.