Abstract :
[fr] En Fédération Wallonie-Bruxelles et au Québec, comme dans de nombreuses autres régions, les systèmes scolaires sont confrontés à des pénuries d’enseignants qui impactent négativement leur qualité. Or, l’une des causes de cette pénurie rapportée par la littérature scientifique est une carence de bien-être professionnel. La nature de la profession induit en effet une exposition au stress qui, en l’absence de stratégies adéquates pour y faire face, peut conduire à des absences prolongées, au burnout, voire à l’abandon du métier. En réponse à ces enjeux et complémentairement à une approche basée sur les déficits, ce mémoire s’insère dans le champ théorique de la psychologie positive. Cette discipline a pour objet l’étude des ressources psychologiques personnelles propres à favoriser un haut niveau de bien-être et un développement optimal, facteurs aidant à faire face aux difficultés susnommées. La littérature en psychologie positive indique d’ailleurs que le bien-être des enseignants exerce une influence à la fois sur leurs performances professionnelles, mais aussi sur le bien-être des élèves. Deux concepts appartenant à ce champ théorique sont donc mobilisés et mis en lien : celui de Capital Psychologique (PsyCap), un ensemble de quatre ressources personnelles en interaction (espoir, auto-efficacité, résilience et optimisme) et celui de bien-être PERMA, fondé sur des dimensions positives (émotions positives, engagement, relations positives, sens et accomplissement).
L’objectif de ce mémoire est d’investiguer un sujet encore très peu étudié dans la littérature scientifique : la nature des liens qui unissent ces deux concepts chez les enseignants. Pour y parvenir, une méthodologie mêlant techniques d’enquête quantitative et qualitative a été mise en œuvre, dans le cadre d’une recherche menée en collaboration avec l’Université du Québec à Trois-Rivières. 106 enseignants de FW-B et du Québec ont répondu à une enquête en deux temps, proposée en décembre 2021 et avril 2022 et 13 enseignants de FW-B ont participé à des entrevues individuelles lors de l’été 2022, ayant pour but d’explorer les résultats quantitatifs obtenus.
Les principaux résultats font état d’un niveau moyen de PsyCap de 4,25 (sur une échelle de 1 à 6), avec un sentiment d’auto-efficacité assez élevé et un optimisme plus faible, et d’un niveau de bien-être PERMA de 7,27 (sur une échelle de 0 à 10) soutenu principalement par le sens et l’engagement. Indépendamment de la région ou de l’ancienneté des enseignants, des profils de PsyCap et de bien-être, constitutifs de la profession semblent ainsi émerger. De plus, l’analyse des résultats met en lumière l’existence de liens à la fois statistiques et de nature qualitative entre le PsyCap et le bien-être PERMA. La reconnaissance professionnelle, par exemple, semble jouer un rôle important dans la relation entre les deux concepts.
Ces résultats restent à confirmer dans des travaux ultérieurs, en raison des limites inhérentes à tout travail scientifique. En l’occurrence, il s’agit surtout de l’échantillon qui est restreint et non représentatif. Cependant, les conclusions du mémoire sont en cohérence avec l’ensemble des recherches similaires recensées dans la littérature. Il n’en reste pas moins qu’il semble très pertinent d’assurer leur diffusion, notamment au moyen du prix Philippe Maystadt. En effet, les résultats obtenus concourent à envisager de nouvelles perspectives de formation et d’intervention, à la fois en formation initiale et continue, dans le développement d’une identité professionnelle fondée sur le bien-être. En outre, le mémoire permet d’initier une réflexion sur la transposition du concept québécois de la psychopédagogie du bien-être à la Fédération Wallonie-Bruxelles, notamment dans un contexte général de réflexion sur le curriculum des futurs enseignants engagés dans la réforme de leur formation initiale. Le bien-être, au-delà d’un état positif indispensable, est alors entendu dans la discussion du mémoire, comme un objet d’apprentissage, avec toutes les implications didactiques que cela suppose.